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Marie-Line van Vuuren, images « installatives »


Elle s’inspire des endroits qu’elle traverse en portant un regard social sur le monde et ses inégalités. Marie-Line van Vuuren produit des dispositifs sur les circonstances changeantes qui définissent la singularité de l’existence.

Sa démarche c’est d’abord la découverte d’un lieu, un ancrage prédominant pour son inspiration qu’elle quête lors de voyages, de résidences artistiques à travers le monde ; chez elle aux Pays-Bas comme ailleurs où la situation peut être fragile et violente.
Ce mode opératoire du « site-specific » permet des images « installatives » intimement liées à leur contexte.
« Un lieu m’interpelle et me touche par son architecture, son emplacement, son histoire humaine, son contexte actuel ou passé (…) Je me pose la question de savoir s’il peut permettre de véhiculer une pensée universelle. »
Pour donner naissance à un sensible commun, le lieu est souvent pris dans un contexte idéologique, de pouvoir et de domination, de construction mémorielle et collective. Marie-Line van Vuuren interroge l’espace, le temps et les formes avec pour support une performance ou une installation. De la capture instantanée du réel aux mises en scène temporaires, elle détourne les éléments pour leur donner une forme plastique et créer une architecture poétique. La photographie intervient ensuite comme moyen de documentation.

Ce travail indiciel n’aborde pas frontalement les questions mais propose un jeu de signes, de gestes transitifs et d’instantanés de vie ; une véritable stratégie de lutte contre l’injustice.
« Le détail perçu tel une perche tendue est déclencheur d’une réflexion. L’absurdité, la colère, le drame, l’injustice, le mal-vivre, l’aspect culturel… sont des éléments qui me touchent par leur échelle humaine, souvent actuelle. »

Chantage, 2017
La série Chantage montre des affiches de propagande ; la politique corrompue du chef du gouvernement de Kampong Cham - ville du centre du Cambodge - qui souhaite construire un pont low-cost et dont les habitants ne veulent pas.
La performance Mémorials met en relief les résidus de la vie quotidienne, des déchets domestiques inévitables jonchant les voies publiques à Doi Saket en Thaïlande.
Usage unique met en scène des armes bricolées aux munitions multicolores évoquées par des pinces ombilicales et s’attache à soutenir que la guerre n’est pas un jeu pour les enfants, c’est même une réalité pour certains d’entre eux qui subissent les conflits armés sur leur territoire.

Déchets, armes, cordes, ficelles, douches… L’artiste s’attarde sur les vestiges du réel sans avoir la volonté d’en révéler l’importance esthétique.
« L’esthétisme n’est pas une fin en soi dans mon travail. S’il joue un rôle dans une installation, je l’utilise comme un élément de lecture, de réflexion, tel un outil pour interpeller, provoquer, émouvoir. » 

Usage unique, 2016, pinces ombilicales, tissu, bois et tubes pvc
L’intime s’imbrique avec le questionnement social pour donner forme au sensible et consistance au visible. Une apparente tranquillité se dégage subtilement, délivrant une sourde gravité. Sa position d’observatrice fabrique des représentations qui touchent le militantisme social et environnemental ; un véritable activisme dont la forme créatrice devient parfaitement identifiable. Cette nécessité de « faire image » avec les lieux, les objets, les matières et les récits rassemblent les couches mémorielles et se cristallisent parfois en fossiles plastiques. Les œuvres de Marie-Line van Vuuren
restent minimales avec un onirisme certain, toujours prêt à s’abstraire du réel. Ce pur moment de relation au monde questionne. Chaque situation reste ouverte au prolongement et à l’interprétation. Le regard, libre de circuler ici et là, oscille d’un niveau de réalité à un autre, dans un écart intuitif où se mêle émotion et réflexion.